samedi 5 juillet 2014

Infervalles.


« Quelque part nos particules intrinsèques
Ont foi en nous. Si nous pouvions seulement les trouver. »

W.S. Graham
"Ustensiles à leur place", 1977



Journée en boîte. Sans sardines. [Végétarien.]
Quatre murs et toujours plus. Appartement vide.
Observer les vides et les pleins.

Bibliothèque pleine. Regarder en fumant une clope les livres les uns contre les autres, plein. 
Ne pas parvenir à ouvrir un livre, ne pas vouloir faire de vide entre les pages.
Fumer la clope mais pas jusqu'à la fin, laisser un peu de tabac au mégot. Jonction.
Lit vide. Toujours poser un drap au-dessus du drap housse, déjouer ce vide.
Les poils sur ma peau, pour ne pas la laisser trop vaine. 
De la poussière sur le parquet pour remplir les lignosités du bois.
Ouvrir la fenêtre. Fermer la fenêtre. Ouvrir les rideaux, pour que leurs plis se touchent, qu'ils soient ensemble.

Se concentrer à être heureux. Je m'invoque, assez dépité. Au milieu de la pièce, sans cartographie pour vérifier le milieu. Ne pas savoir comment. Simuler, représenter. Post-modernité. (« Marchandise informationnelle », Lyotard.)
La concentration bouffe toute la joie prétendue, publicitaire. Affamé à s'être trop concentré, je déglutis le vide le long de la trachée dont l'humidité des corps n'est que nostalgie, hernie du manque. La gorge racle la question : à quoi bon la poésie, à quoi bon le savoir. Je ne parcours que des distances de partages qui ne vibrent plus mais bouillonnent de cette lumière si particulière - presque pelliculaire - lorsqu'elle est enfermée dans le coeur. Stationnaire.
De la neige qui s'effrite en moi, en juillet. Le silence est ce terrain dimensionnel d'où les vides et les pleins ne prétendent aucune distinction.

Si seulement je ne savais pas encore qui j'étais. 
Hier je rêvais de te rencontrer de nouveau. Sans plus jamais que quoi que ce soit ne convienne pas. Cet impossible possible, comme si l'on vrillait chaque muscle pour vouloir tout changer de l'ossature. Ma main deviendrait une vertèbre qui caresse la nuque de ta paume.
Mais vouloir, ce n'est plus. Alors que je veux, toujours autant, comme le caillou donné. Mais que ça rouille, si silencieusement. Si vide, si plein. Comme enlever d'un mouvement ses lignes à venir, ses scintillements. Alors les grains de sables savent que la mer s'est rouillée. Ce savoir là, sans toi, je n'en veux pas.
Tous mes postulats sont détestables, n'est-ce pas. Je vais apprendre cette autre langue de bord de mer pour ne plus parvenir à postuler de la mienne. Ma langue n'a rien relié, et si j'essaie de lécher mon sourire elle se coupe désormais sur des lèvres tellement maigres de ne plus apprendre des tiennes.



2 commentaires:

  1. A quoi sert la poésie...
    à dire cela
    cela que vous dites

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  2. Alexis, permettez-moi de m'insurger au creux de votre gentillesse et de votre fidélité : si tant est que c'est de la poésie « cela » alors c'est de la poésie morte. C'est de la poésie de serpillière, de ce lieu d'écriture-serpillière, de vomis et de pleurs déplorables et ingrats. D'une écriture qui ne cesse pas de surgir à mon esprit autant que le manque d'une personne ne cesse pas de germer à mon âme, et j'en suis faible.

    La poésie qui existe, la seule, est vivante, tellement vivante qu'elle se vit plutôt qu'elle ne s'écrit. Ici ce n'est qu'un écriture blafarde et insomniaque.

    Merci quoi qu'il en soit pour votre présence, même depuis le lointain de votre lieu tout en escaliers. :)


    cx

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