vendredi 1 mai 2015

Still quiet. [notes praxis]


> D'une pratique méditative
/ dans un train, massif et totale vitesse
/ cette observation, considération, qui fut fragmentaire à vrai dire sûrement toute ma vie :
l'immobilité est le mouvement fondamental
l'immobilité est le plus grand mouvement.


Durant des méditations il y a ce moment d'ancrage vibratoire. Cet accueil d'un magnétisme centripète et centrifuge. D'où ce qui fait mouvement est ce qui est planétaire/s, stellaire, 'mais' dont l'être-là se trouve sacré en une absolue immobilité. 
Cette immobilité crée le mouvement, c'est à partir d'elle que se ressent les alentours en mouvements.
L'immobilité est peut-être le plus difficile mouvement. Car le plus inavoué, le plus perturbable aussi. Flotter, planer, stabiliser, ça nécessite l'union de toutes les forces ambiantes, l'immobilité serait une profonde réception des mobiles (phy) et des mouvants (psy). 

Il y a en ces atteintes méditatives du sauvage, du devenir-animal. Deleuzien : un champ d'immanence peuplé de multiplicité, soit le désir et sa force. 
L'immanence serait peut-être ce magnétisme que j'explore de mieux en mieux consciemment grâce aux personnes disant l'éprouver en ma présence : il s'agit d'une pleine zone des devenirs, une sensibilité à savoir émettre ce qui est reçu, à désirer partager les transformations, les fabrications 'pensibles'. Une plate-forme des possibles immobiles. Une éthique érotique.

L'immobilité m'apparaît la plus subtile des invitations. De toute mon âme je souhaite la défaire des idées d'isolation, de contention, d'immobilisme. (Ce qui ne contredit pas la nécessité de mouvements comme parallèle énergétique, ni la frustration de restrictions de mobilité.)
Il y a ce chouette échange avec l'instructrice Feldenkrais lors de notre travail commun : elle raconte comment pendant des années et des années elle a pratiqué le yoga avec la règle de la discipline, discipline en postures, discipline en apprentissage, discipline en pratiques. Elle en a conclu que la discipline fige pour prétendre accueillir mais n'accueille pas. J'ai souri, de cette impression que bon nombre de personnes valides conçoivent bien souvent l'immobilité comme (f)rigide, et que lorsqu'ils-elles s'y essayent peu convaincu-e-s à partir d'une mise en forme (préforme) sensationnelle ils-elles en érigent une « dé-tension », un enfermement d'elleux-mêmes.


\ Quel serait le mouvement de « sois maintenant » ?
\\ Envers. Un mouvement se faisant en+vers.

« alors vous lui réapprendrez à danser à l'envers
comme dans le délire des bals musette
et cet envers sera son véritable endroit »
-- Antonin Artaud
"Pour en finir avec le jugement de dieu", Œeuvres Complètes XIII, p. 104







3 commentaires:

  1. Beaucoup de concepts péjoratifs liés à l’immobilité et l’isolement :
    - "cloué à un fauteuil roulant", cette expression ridicule dont Céline aime tant se moquer, se comparant alors à Jésus
    - "un con qui marche va plus loin qu’un érudit assis",en êtes vous si sûr
    - l’idée que si on est chez soi, si on est assis, on ne fait rien
    - l’idée que parler, écrire, ou pire : penser, c’est ne rien faire
    - l’idée que seul, on ne va nul part, que la solitude est toujours subie, que c’est un malheur.

    Tout cela par manque d’attention.

    Quand j’étais gosse, l’agoraphobie dictait déjà ma vie, mais n’avais pas été reconnue par mon médecin. Quand je pouvais enfin être seul⋅e, en général, c’était aux WC, car si j’allais dans ma chambre, soit mon frère, soit ma mère, entrait en trombe. Dans la salle de bain, je n’avais jamais une minute seule car ma mère s’y enfermait avec moi pour me harceler. Alors quand j’étais seul⋅e, aux WC, chez mes parents ou ailleur, je me sentais capable. En fait, je reprenais pleinement possession de mes capacités mentales, ce qui n’est pas le cas quand je suis accompagné⋅e. J’ai mis des années à pouvoir profiter de suffisament de solitude pour réaliser que c’est la seule condition obligatoire à ma capacité à réfléchir pleinement.
    Et en m’isolant, toujours le même rituel. Je fabrique un cocon, je rapproche de moi ce qui est nécessaire, afin de devoir faire le moins de mouvements possibles. Mon espace se réduit à 2 ou 3m² dans lesquels j’organise ma vie. Quand je peux enfin me recroqueviller l’esprit tranquille, c’est le meilleur moment.

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  2. Merci pour ton partage.

    Après j'ai l'impression que tu réagis bien plus à une notion de solitude que d'immobilité. Et d'isolement versus du faire.
    Il me semble que je questionnais l'immobilisme sensitif (notion fictive, en définitive), sans traiter ici toutes les considérations de la « mobilité sociale ». En tout cas pour ce qui est de la solitude, personnellement j'aime précieusement l'immobilité partagée, je conçois des immobilités solitaires autant que d'autres en contact/s ; les deux se nourrissent.

    Je crois que la méditation apprend justement à se dé-recroqueviller. :) Intérieurement, extérieurement, en mouvements circulatoires, constellatoires.


    cx

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  3. Quand je dis "recroqueviller" c’est ce que je fais physiquement, par réflexe, quand je suis à l’aise. Mon esprit en revanche est bien + ouvert dans ces moments là. :P

    En effet je n’avais pas tout saisi de ton texte, c’est un peu difficile de te suivre parfois, mais toujours intéressant.

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