Les voir arriver par dizaines et dizaines, des nuées de petites flèches sombres qui fusent dans le ciel au dessus de moi. Des étoiles noires, comme dit Bro.
Sensationnel, je sursaute d'éclats de rires et d'envies irrésistibles de lever les bras, de bondir dans les airs. Se sentir tellement petit à côté de tant d'oiseaux, en être heureux.
Puis pendant plusieurs dizaines de minutes, chaque groupe volant va se poser minutieusement sur une des trois grues. Jusqu'à remplir entièrement les géants perchoirs métalliques.
Spectacle impressionnant de ces grues devenues entièrement grouillantes d'innombrables vies piaillantes jusqu'à recouvrir le son du pont routier en-dessous.
Ode au soleil couchant, contemplé par des centaines d'oiseaux. Je me dis que tous ces êtres n'ont pas de montres mais une admirable harmonie avec le temps.
Et par dizaines ils repartent à la nuit tombée.
Me laissant un immense sentiment de gratitude.
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--> En rentrant vers l'hotel il y a eu un accident de voiture à un gros croisement au centre ville.
Je ne supporte pas les voitures, du moins comme objet nettement capitaliste. Tout mon corps s'est crispé en entendant les crissements des pneus, l'éclair de la tôle froissée et l'explosion du verre.
À peine une seconde.
La seconde d'après un silence autant interne qu'externe, comme une suspension de l'univers.
La troisième seconde je me dis que quelqu'un-e est mort, de cet étrange rapport que j'ai à la mort, d'ordre informationnel.
Les secondes suivantes je réalise que tou-te-s les passant-e-s de la rue regardent, de ces regards cathodiques qui comatent le monde. Ce qui me fait ressentir une sensation de mort cette fois-ci insupportable, de cette petite mort-vivante banalisée ; alors je fonce avec Bro (parfaite connexion mutuelle, fraternelle) au milieu de la route vers la voiture accidentée la plus proche.
Au même moment la jeune conductrice bouge et sort de la voiture (la conductrice de la deuxième voiture aussi, Bro est avec elle). Je lui souris, étonnement en la regardant vraiment dans les yeux ==> contact de vie, avec toute la douceur que je peux lui transmettre.
Et je ne parviens pas à lui dire grand chose (en une quinzaine de minutes j'ai tenté toutefois quelques blagues qui lui ont décrochée deux sourires au milieu de quelques larmes... et l'écouter, lui parler doucement pour lui permettre de moins trembler), si ce n'est : je suis content que vous soyez en vie. Et à cette phrase j'ai senti des martinets noirs s'envoler depuis ma tête.